Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01 novembre 2005

Raymond Hains

« Comme chacun s'y attendait, à peine assis devant le melon qu'on avait à tout hasard épargné et qu'il curait méthodiquement sans le manger, Raymond Hains avait repris le monologue sur les coïncidences de signes — qu'il avait commencé dans les années quarante et qu'il n'interrompait jamais que pour demander à ses auditeurs s'ils pensaient qu'elles étaient dues au hasard ou bien à autre chose et qu'il reprenait aussitôt sans attendre leur réponse »

Richard Sünder


J'ai appris hier en lisant le journal de Jean-Claude Bourdais qu'un des grands facteurs de coïncidences de notre temps venait de mourir. Il s'agit de l'artiste Raymond Hains, qu'on rattache traditionnellement au mouvement des Nouveaux Réalistes, avec Arman, François Dufrêne,  Yves Klein, Martial Raysse, Daniel Spoerri, Jean Tinguely et Jacques Mahé de la Villeglé, sous l'égide du critique d'art Pierre Restany. Incidemment j'ai retrouvé la trace de Richard Sünder, créateur de la théorie pansémiotique, dont il exposa jadis les passionnants et abscons linéaments dans l'éphémère journal Don Quichotte, et que depuis je n'avais jamais plus croisé. « La pansémiotique, est-il expliqué sur son site, est la théorie selon laquelle,tout, dans le cosmos, est signe, chargé, par le Surréel (ou les inconscients), d'une signification cachée, à destination de la conscience, qui a pour objet de la décoder. » Sünder raconte avec beaucoup d'humour une soirée passée avec Raymond Hains, intarissable causeur, écoulant sans grand souci de ses interlocuteurs, la cascade mouvementée de ses associations mentales.

 

Macintoshage, image numérique, 2000

Un facteur de coïncidences peut-il tirer sa révérence sans envoyer quelques signes discrets à la petite communauté des scrutateurs du hasard ? Je lis dans l'article du Monde, écrit par Philippe Dagen, que « D'un nom propre à un autre, d'un calembour à une homonymie, d'une allusion hermétique à une plaisanterie idiote, d'une référence extrêmement savante et rare à une blague, Hains tisse des filets de significations et de sous-entendus, laissant au spectateur le soin de ne pas s'y perdre. (...)La dérision est constante, le détachement aussi : à aucun moment, Raymond Hains n'a songé à tirer parti de sa notoriété et à poser au maître, encore moins à y trouver des avantages économiques, lui qui a mené une vie de "clochard céleste" et qui ne regardait qu'avec méfiance hommages et rétrospectives. Celle qui, après bien des retards, eut lieu au Centre Pompidou en 2001 s'intitulait justement"Raymond Hains, la tentative".
C'est en cela qu'il a été un Dada égaré dans une époque très peu faite pour une telle indépendance. Tout en se moquant des filiations et des historiens, il n'en accepta pas moins le prix Schwitters en 1997 de la ville de Hanovre. Cette distinction portant le nom de l'ironique artiste allemand était en effet la seule qui pouvait lui convenir. »

medium_schwitters.jpg

Il se trouve que c'est un collage de Shwitters qui trône en fond d'écran sur mon ordinateur depuis quelques jours, et que je viens juste d'achever la lecture du Cézanne de Philippe Dagen...


Commentaires

J'aime bien cette incursion dans le temps présent mâtiné de cette présence/absence du colleur/décolleur/dadafiche.
Ce qui donne le respect c'est cette posture fidèle quoiqu'il arrive autour, ce don de soi sans compter.
Ces clochards célestes ne sont-ils pas les bâtisseurs de cathédrales d'aujourd'hui?

Écrit par : colette | 01 novembre 2005

Si cette mort vous attriste autant que moi, je vous conseille :
"Raymond Hains, uns romans" ainsi que le catalogue des 3 cartiers (il reste encore 3 exemplaires disponibles à la fondation éponyme).

Je vous laisse un lien supplémentaire sur la culture qui vu votre éclectisme pourrait vous intéresser : www.u-lik.com

Écrit par : leafar | 02 novembre 2005

Le temps présent m'importe, et d'aimer l'art roman ne me conduit pas à refuser l'art contemporain, qui a à voir lui aussi parfois avec le sacré, comme vous le suggérez si bien, Colette.
Merci, monsieur Leafar, pour les indications bibliophiliques, ainsi que pour le lien vers u-lik.

Écrit par : Robin | 03 novembre 2005

Les commentaires sont fermés.