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24 avril 2005

Du Belin au Troubadour

"Nous découlons, voilà la vérité.
Nous ne descendons pas de. Et, en dépit de nos efforts, nous n'aspirons guère à... Nous découlons... D'une source obscure et de ses ramifications. Nous sommes la rumeur des eaux ancestrales ; elles nous ont transmis la parole et elles nous la reprendrons sans violence, comme on fait taire un enfant d'un linge humide passé sur les tempes."

Pierre Veilletet (Bords d'eaux, Arléa, 1999)


Encore une confirmation que c'est au jour le jour que s'invente le chemin stellaire : c'est en cherchant aujourd'hui même sur la Toile des informations sur le Château-Guillaume, forteresse fondée par Guillaume IX d'Aquitaine sur la paroisse de Lignac non loin de l'alignement ligneux qui nous occupe depuis deux jours, que je découvre que la petite-fille du seigneur en question, qui n'est autre que notre vieille connaissance Aliénor d'Aquitaine, est née en 1122 au château de Belin, en Gironde.
Elle aurait passé ici son enfance, à quelques kilomètres du bassin d'Arcachon, dans la compagnie des paysans, parlant patois, marchant sur des échasses, montant à cheval. Reconnaissante, elle aurait accordé une charte d'affranchissement à la paroisse, confirmée plus tard par Philippe le Bel ( poussera-t-on la plaisanterie jusqu'à le rattacher lui aussi au Belin ?)

Incidemment, c'est à quelques encablures de Belin, aujourd'hui Belin-Béliet, que je me suis retiré pour la petite pause océane qui m'a tenu éloigné quelques jours de ce blog...

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Revenons à nos moutons : Château-Guillaume fut donc élevé entre 1087 et 1112 par Guillaume IX dit aussi le Troubadour - pratiquement à la même époque, soit dit en passant, que l'abbaye de Fontdouce (1111). Guillaume est un gaillard qui conjugue le goût des armes et celui des vers : expéditions militaires, croisade, participation à la Reconquista qui ne lui valent pourtant pas la reconnaissance de l'Eglise, et pour cause : il s'empare de biens religieux pour financer sa campagne contre Toulouse et va jusqu'à enlever à main armée la femme de son vassal, le vicomte de Chatellerault, ce qui lui vaut l'excommunication. Au légat chauve qui lui aurait enjoint de s'en séparer, il aurait rétorqué : « Compte là-dessus, et passe-toi le peigne ! » Cette maîtresse séjourna donc dans un donjon qu'il fera adjoindre à son palais : la tour Maubergeon, dont le nom vient du mérovingien mal ou mallum qui désigne le tribunal, et de berg qui signifie colline. Cette muse qu'il appelle, lui, la "Dangereuse" est bientôt surnommée par le peuple la " Maubergeonne ". Claude Lecouteux note que c'est dans cette tour Maubergeon que Couldrette dit qu'on trouva deux livres en latin rapportant la légende de Mélusine.

C'est que Guillaume est aussi un homme curieux et cultivé qui, avant Aliénor, sut accueillir dans sa cour de Poitiers les artistes de son temps, ainsi le chevalier et barde gallois Blédri ap Davidor qui réintroduisit en Gaule l'histoire de Tristan et Iseut. Et puis c'est surtout l'un des premiers troubadours, écrivant en langue d'oc, et non pas en latin, des chansons d'amour, parfois très crues (par exemple dans la chanson convenable, il demande à ses compagnons quel cheval il doit monter, d'Agnès ou d'Arsens). On fera plus subtil par la suite...

En Espagne, à la bataille de Cutanda, il aurait combattu avec la corps de sa maîtresse peint sur son bouclier.

Ce rustre fougueux est aussi capable de vers charmants :
Ab la doussor del temps novel
folhon li bosc e li auzel
chanton chascus en lor lati
segon lo vers del novel chan :
adonc esta ben qu'om s'aizi
d'aisso dont om a plus talan.


Par la douceur du temps nouveau
feuillent les bois et les oiseaux
chantent chacun dans son latin
sur le rythme d'un chant nouveau
donc il convient que l'on s'accommode (se réjouisse)
de ce qu'on désire le plus !

00:55 Publié dans Bélier | Lien permanent | Commentaires (3)

Commentaires

J'ai très bien connu Pierre Veilletet, et aussi Belin-Béliet... Clin d'oeil en passant, sur ce site délicieux découvert grâce à OrnithOrynque !

Écrit par : Alina | 24 avril 2005

Bonjour,
juste une précision à propos d' Ingrandes pour vous signaler une petite erreur en ce qui concerne le musée d' Henry de Monfreid : il ne se situe pas du tout dans la maison qu' il a occupée mais dans l' ancienne cure (presbytère) de la commune qui abrite également la bibliothèque municipale.
Cordialement.

Écrit par : Patrick | 04 mai 2005

Merci pour votre rectification. Je vais corriger mon erreur sur le site. Cela m'a d'ailleurs permis de reprendre l'itinéraire d'Henry de Monfreid et d'y découvrir une autre coïncidence avec la géographie sidérale. Cela fera l'objet d'une prochaine note.
Bien à vous.

Écrit par : Robin Plackert | 05 mai 2005

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