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27 avril 2005

Le Faussaire et l'Araignée

"Chaque espèce avait sa façon de recommencer à vivre. Les pommiers débutaient modestement, chargés de papillottes roussies et sales, les noyers se nimbaient d'un nuage qui avait la pâleur de l'automne ; un grand peuplier brûlait dans sa verdure tendre et esquissait, à voix basse, les premières mesures de cette rumeur ruisselante qui l'habiterait tant de jours et tant de nuits. Partout l'âge et la vieillesse se masquaient et le bras décharné des chênes se cachait sous les grappes vertes."

"Le printemps qu'elle ignorait était comme une immense page neuve ouverte à son chevet et sa jeunesse universelle, sa fraîcheur, rendait pitoyable le visage légèrement rougi et gonflé, posé sur la chevelure. Les premières rides le marquaient et l'involontaire sourire des lèvres entrouvertes paraissait une ébauche de grimace sans signification, tourné vers un monde impénétrable."


Jean Blanzat (La Gartempe)

Fin de l'entracte ? Avec prudence, j'avais ajouté un point d'interrogation. Dans la nuit même, j'ai eu confirmation qu'il était justement pressenti. L'article mis en ligne, je répondis au commentaire de Philippe Henry qui me posait une question sur Tarkovski. Je me permets de reprendre ici ce que j'écrivis :

"Désolé, Philippe, je ne connais ni Charles Fort, ni le film Magnolia. Enfin, maintenant un peu, après recherche sur le web suite à votre commentaire. Plutôt que de vous répondre sur Tarkovski, je vous invite à voir Sacrifice ou Stalker ou n'importe quel autre de ses films : sa vision va bien au-delà d'une simple curiosité pour le paranormal. Les faits insolites ne sont que l'écume d'un phénomène autrement profond.
Bien à vous. "


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Eglise de Saint-Savin-sur-Gartempe(photo. F.Thurion)

Enfin, malgré l'heure tardive, je décide de refaire une recherche sur Google au sujet de Jean Blanzat. La première, ciblant aussi La Gartempe, avait été tout à fait décevante – le web est parfois désespérément lacunaire ; celle-ci, sur Jean Blanzat uniquement, ne livra pas grand chose de plus. Aucun texte approfondi, que de courtes et sèches biographies, et puis, dans la troisième page de recherche, le site du Stalker apparaît. Je tombe sur un article du 10 avril 2004, intitulé Solaris de Stanislas Lem et le Dieu incompréhensible : Juan Asensio y présente un texte antérieur, une fine et stimulante analyse du célèbre roman de S.F. avec de nombreuses références au film qu'en a tiré Tarkovski. C'est le passage suivant qui cite Jean Blanzat :

"Je ne crois pas aux recommencements et les idiotes qui, d’un geste devant leur miroir, effacent pour un autre les rides et les plis de souffrance de leur visage repeint à neuf, seront tôt ou tard hantées par des souvenirs plus aigres qu’un renvoi de bile. Non. Il y a, il doit y avoir autre chose car enfin, si le texte écrit a découvert quelque parcelle de la vérité âprement recherchée, il doit bien être valable, mon Dieu, au-delà de quelques mois, voire années, sans devoir se ratatiner comme un trognon de pomme oublié de tous ou comme cette… cette quoi ? (amande, noisette ou je ne sais quoi d’autre, petit et infiniment desséché) qui n’en finit pas de se momifier dans l’étrange roman d’un auteur aujourd’hui bien oublié, Jean Blanzat, intitulé Le Faussaire. "


Oublié, ma vaine quête le confirme. Mais sa résurgence ces jours-ci ne cesse de nous intriguer. Recherchant cette page aujourd'hui pour la rédaction de cette note, c'est sur un autre article, daté du 7 février 2005, Diapsalmata ou interlude entre diverses lectures, que je retrouve mention du même Faussaire, en des termes presque identiques :

"Quelques modifications (et non point rétrogradations, chers Joseph et Thibault...), pour commencer, dans mes listes de liens. Quelques nouveaux liens aussi, il faut contribuer n'est-ce pas à l'extension du domaine de la Toile, qui finira bien par enserrer complètement un monde devenu transparent, desséché, comme cette araignée évidée qu'évoque quelque part Gadenne, reprenant d'ailleurs une image de saint Jérôme. Une araignée desséchée, suspendue à un coin de poutre, ou bien cette coquille de noix abandonnée sous un meuble dont parle Jean Blanzat dans un étrange roman, oublié de tous, Le Faussaire, voilà ce que je suis, certainement pas le loup solitaire qui de loin contemple les hommes et s'en retourne, trottinant de travers, au plus profond des bois silencieux."


L'araignée électronique dévide son fil d'Ariane et, parmi le dédale actuel des blogs, nous livre donc quelques pistes rêveuses.

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