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05 mai 2005

Ronan et les loups

Le nemeton de Locronan se situait dans la forêt de Névet. Il est clair que le christianisme a dû renoncer à éradiquer purement et simplement le lieu et les cultes qui s'y rattachaient. Il a fallu créer la légende de Ronan pour leur donner un vernis évangélique. Sur la Toile, j'ai trouvé plusieurs variantes. L'une -celle du site de la cité- fait du saint irlandais un évêque chargé à Rome de déterminer la date de Pâques pour les années suivantes – ce qui est tout à fait absurde. Nous préférerons celle de l'abbé Maurice Dilasser, ancien recteur de Locronan :

"L’histoire légendaire assure qu’après sa navigation et un passage infructueux sur les terres léonardes, il fixa son ermitage dans les bois de Névet, suivant les indications d’un ange. Là il cheminait habituellement sur le parcours des antiques déambulations. Il signalait son passage, au son de sa cloche à main, qui écartait les loups et les suppôts diaboliques, et invitait à la prière. La vie latine du saint rapporte que, malgré son témoignage de lumière une femme hostile le fit passer pour un être de ténèbres. Calomnié, accusé de lycanthropie, il s’en alla mourir près de Saint-Brieuc. Là, le corps du saint, fut déposé sur un char ; et tiré par des bœufs, marchant à l’aventure, il fit retour au lieu même de son ermitage, en rejoignant sur la fin de sa course son circuit familier.
Quoi qu’il en soit, au XIe siècle, son culte rapidement répandu incita un comte de Cornouaille Alain Caignart, victorieux d’ un combat décisif par l’invocation de la croix et du nom de saint Ronan, à constituer un prieuré et son domaine, le locus Ronani, Locronan, vers où convergea un courant de pèlerinages. "



On remarquera l'insistance dans la légende sur les loups (ceux qu'il écarte avec sa cloche, l'accusation de lycanthropie). A l'époque de la rédaction de l'histoire latine de Ronan, la Vita Ronani, datée du XIIIème, les clercs ont commencé à répandre la symbolique du loup comme représentant des forces obscures ou diaboliques, mais auparavant le loup avait un statut plus ambivalent. "Positif apparaît le symbolisme du loup, note le Dictionnaire des Symboles, si l'on remarque qu'il voit la nuit. Il devient alors symbole de lumière, solaire, héros guerrier, ancêtre mythique. C'est la signification chez les Nordiques et chez les Grecs où il est attribué à Belen ou à Apollon (Apollon lycien)"

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Le loup et l’agneau
Paris, BNF, département des Manuscrits, Français 15213, fol. 12v.


Nous retrouvons donc là encore des divinités bien connues. Les mêmes auteurs signalent plus loin que le loup, comme l'illustre la fable de la louve de Rémus et Romulus, est associé à l' idée de fécondité. M. Dilasser lui-même ne peut passer sous silence l'existence de pierres de fécondité sur le parcours de la Troménie, et en particulier la Gazeg vaen , la Jument de pierre ou la Cavale Blanche, un mégalithe présenté aussi comme "la chaise de Ronan", et sur lequel, aujourd'hui encore, certaines femmes s'assoient dans l'espoir de provoquer une maternité.

Il est remarquable qu' homologiquement, à Bélâbre, dans le parc de l'ancien château, un gisant de pierre du 15ème soit dit de saint Greluchon. Ce saint, dont on trouve d'autres occurences dans le Berry (Nohant-Vic, Gargilesse par exemple), est plus que suspect aux yeux de l'église. Son nom évoque en effet la guerliche, autrement dit le sexe en patois. A Gargilesse, "les femmes en mal d’enfants râpaient consciencieusement à l’endroit du sexe un peu de la pierre du gisant qu’elles buvaient pendant 9 jours dans du lait, le chiffre 9 symbolisant les 9 mois de grossesse, et le lait, la maternité. Elles allaient jusqu’à simuler l’acte sexuel dans la crypte. Les jeunes filles qui voulaient se marier piquaient avec des épingles le nez du Saint ! En 1736, le curé de Gargilesse signalait l’abus de ses paroissiennes. Ordre fut donné de murer la statuette en bois de Saint Guerluchon."



01:15 Publié dans Bélier | Lien permanent | Commentaires (0)

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