Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

16 mai 2005

Guillaume et Robert

Plus j'avance dans cette étude sur Villesalem, plus je suis captivé par l'étrange figure de Robert d'Arbrissel. Je ne vais pas ici donner sa biographie (il suffit de cliquer sur les liens pour ceux que ça intéresse), mais je voudrais revenir sur la nature des lieux qu'il a fondés. Fontevraud, tout d'abord. Il ne faudrait pas croire que ce site fut choisi un peu au hasard de ses pérégrinations inlassables, parce que brusquement le concile de Poitiers, en 1100, l'a sommé de fixer sa troupe errante où - péché majeur aux yeux des légats du pape - se mêlent les hommes et les femmes. Il est patent que le choix du site est mûrement réfléchi : ce « désert » où il s'est retiré, ce « lieu inculte et âpre, plein d'épines et de buissons », ce vallon isolé de Fontevraud n' est rien moins qu'à la croisée de trois provinces, à la limite de l'évêché d'Angers et de l'archevêché de Tours, à l'extrême pointe septentrionale du diocèse de Poitiers. Offert par le seigneur Gauthier de Monsoreau, dont la fille a rejoint la communauté, il est aussi à une lieue de Candes Saint-Martin, au confluent de la Loire et de la Vienne, où le célèbre saint a rendu l'âme à Dieu.

medium_fontevraud.jpg


Le choix de Villesalem relève d'un même souci stratégique : il s'agit là aussi d'un vallon isolé, avec présence d'une source (à Villesalem, elle est même à l'intérieur de l'église), et sa localisation là encore dans le diocèse de Poitiers coïncide avec une grande proximité avec les diocèses de Bourges et de Limoges. De même, sur un plan autre que religieux, c'est sa situation au carrefour de trois provinces qui vaut au hameau des Hérolles, à quinze kilomètres à vol d'oiseau de Villesalem, d'accueillir une des plus grandes foires de la région (foire aux Béliers, qui plus est...).


medium_villesalem-carte.jpg

Villesalem (non indiqué sur cette carte des diocèses du 18ème)

Et qui fait la loi en ce temps-là sur le Poitou ? Une vieille connaissance, le redouté Guillaume d'Aquitaine, troubadour et baroudeur. Je n'avais pas fait le rapprochement, malgré les dates communes (Château-Guillaume édifié entre 1087 et 1112, par exemple). C'est en tombant sur le site de Marc Briand que j'ai appris que Guillaume s'était emparé à deux reprises de Toulouse accompagné chaque fois par Robert d'Arbrissel. « Deux documents l’attestent, l’un en Juillet 1098 qui modifie les prérogatives de Saint-Sernin et le second, en 1114, concernant la fondation du prieuré de Lespinasse, au nord de Toulouse, tout de suite rattaché à Fontevrault. » Leurs signatures voisineraient sur plusieurs actes. « D’autres ont établi une corrélation entre Fontevrault et l’Amour courtois qui prend son essor à la même époque ; la place faite aux femmes par Robert d’Arbrissel qui voulait que l’abbesse ait aussi autorité sur les moines de l’ordre aurait eu une influence sur une littérature qui exalte la femme et son rôle dans la «fin’amor». Un lien de cause à effet est difficile à établir : que les différentes facettes d’une époque trouvent un style n’est pas extraordinaire. »

Cette alliance entre deux trublions de l'époque laisse rêveur : poésie et géographie symbolique, architecture et politique, mythes et réalité se mêlent de façon inextricable, comme dans un buisson d'épines de ces déserts aimés du breton.

Sur le site de la ville de Lespinasse, je vérifie qu'en effet Robert d’Arbrissel reçut la forêt dite d’Espèse - qui s’étendait avec ses garrigues entre l’Hers et la Garonne - de Philippa, fille de Guillaume IV, Comte de Toulouse, et épouse en seconde noces de Guillaume IX Duc d’Aquitaine. On ajoute qu' elle prit le voile à Fontevraud et devint abbesse. Il faut se souvenir qu'elle fut répudiée par Guillaume au profit de la « Maubergeonne ». Autre exemple de l'accord bien senti entre Guillaume et Robert.

00:50 Publié dans Bélier | Lien permanent | Commentaires (0)

Les commentaires sont fermés.