17 mai 2006
Rodène la rhodanienne
De Nantosuelta à Mélusine, en passant par le Chaperon Rouge, Rodène affiche une belle diversité de dénominations. Il reste qu'aucune de ses hypostases, si je puis dire, ne présente une ressemblance phonétique avec la sainte de Levroux. Le site Carmina assimile son nom au languedocien rondina, de rondinar, qui signifie ronchonner (la sainte serait parfois désignée comme sainte Ronchonne).
Explorons une autre piste : le nom qui m'a tout de suite paru le plus proche de Rodène, c'est celui du Rhône, en latin Rodanus. Dans l'hypothèse d'une identification Rodène-Silvain à Nantosuelta-Sucellus, il faut noter que le culte de ce couple divin est particulièrement dense dans les régions proches du fleuve, comme en atteste cet extrait de Lambrechts, cité par J.J. Hatt :
« Si nous jetons un coup d'oeil sur la carte de répartition géograhique du dieu au maillet, nous voyons que son culte se répartit en trois groupes : l'embouchure de la vallée du Rhône, le Rhône supérieur et la vallée de la Saône, surtout le pays héduen, enfin un troisième groupe, beaucoup moins important, dans le Nord-Est de la Gaule, surtout en pays médiomatrique. L'on peut affirmer que la région du Rhône et de la Saône doit être considérée comme le lieu d'origine du culte du dieu au maillet. » (Contribution à l'étude des dieux celtiques, p. 115.)
« (...) l'autre explication serait qu'il vient d'un terme hydronymique prélatin dan précédé d'un terme gaulois ro fort cours d'eau. En fait le rho orthographié avec l'h viendrait d'un snobisme des Latins qui ont assimilé ce son à la lettre grecque exprimant la violence. »
Fort cours d'eau, rivière hardie, désignent en tout cas indubitablement le Rhône comme un fleuve impétueux, proche du torrent qu'il était en amont du lac Léman. Le Rhin, qui est proche étymologiquement, était aussi un fleuve sauvage : « Son cours était autrefois si impétueux et imprévisible qu'aucune grande ville ne s'est installée à sa proximité immédiate. » Or, on a vu que Nantosuelta tenait l'origine du premier élément de son nom dans le gaulois nantos, vallée, torrent (d'ailleurs le savoyard nant désigne encore de nos jours un torrent).
De même, la tribu celte qui occupait le Valais, autrement dit la haute vallée du Rhône, se nommait les Nantuates (elle a aussi donné son nom à la ville de Nantua).
15:20 Publié dans Capricorne | Lien permanent | Commentaires (3)
Commentaires
Bonsoir,
On ne peut s'empêcher également d'y voir, même si votre éthymologie du Rhône semble plus orthodoxe, la racine grecque RODON = Rose que l'on retrouve dans beaucoup de nom tant géographique (Rhodes) que botaniques (Rhododendrons) et qui fait également référence à la couleur Rose ou ROUGE comme votre chaperon d'il y a peu ! Le nom provençal du Rhône y fait d'ailleurs directement référence "Lou Rose".
Écrit par : Marc Lebeau | 17 mai 2006
Bonsoir Marc,
Je ne savais pas du tout que le Rhône se disait Lou Rose en provençal (alors que la chose est dite dans la page du forum cité, mais j'avais lu trop vite). Il n'est pas impossible que ce nom condense plusieurs strates de sens, chaque époque y projetant ses mythes. Il est amusant que ce soit le chaperon rouge qui fasse lien entre ces diverses acceptions...
L'ambroisie, que Dumézil pense reconnaître dans le petit pot de beurre, est décrite dans l'Iliade comme " une huile divine fleurant la rose".
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ambroisie
Écrit par : Robin | 18 mai 2006
Du coup, je suis aller voir le forum que vous mentionnez et qui me semble tout-à-fait passionnant ! Merci
Écrit par : Marc Lebeau | 18 mai 2006
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