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17 mai 2012

Jean-Pierre Le Goff

"Le 29 novembre 1993, je me rendais, dans l'Indre, à Pouligny-Saint-Pierre, au lieu-dit "La Jozière", accompagné d'une amie, j'oignais la pierre d'une rosée que cette amie avait patiemment récoltée dans son jardin. J'ai voulu cet acte comme une simple marque de sacré et de poésie, comme une liturgie subreptice à une Vénus sylvestre, comme une offrande à une dryade."

La vulve de pierre, in Le cachet de la poste, Gallimard/L'arbalète,  p. 111.

Je retourne au clavier, après six mois de silence sur ce site, pour saluer la mémoire de l'écrivain Jean-Pierre Le Goff, qui s'est éteint le 26 février à Montmorillon, si l'on en croit le site L'Alamblog, un des rares à porter la nouvelle (mais on lira aussi avec intérêt le billet de Nouvelles Hybrides, daté du 3 mars, qui rend compte de l'hommage de ses amis à Douarnenez, sa ville natale, où il fut donc aussi enterré, avec le para-rite imaginé par sa fille Alice, collier de perles, oeufs de lumière verts ou rouges, autour duquel les personnes présentes firent un autre collier de perles, humaines cette fois).

Je n'aurai rien su moi-même si quelqu'un qui l'avait bien connu, et accompagné parfois dans ses pérégrinations bretonnes, ne m'en avait informé ce matin. Personne que j'ai rencontrée sur le net, à l'occasion des quelques articles que je lui avais consacré. Le 11/11/2011, me précise-t-elle, alors qu'il travaillait beaucoup sur le onze. Personne (dont je tais le nom car je ne sais si elle aurait envie que je la cite) avec qui le fil de l'échange n'a fait que s'approfondir, et c'est bien là encore une bien belle chose que je dois à Jean-Pierre Le Goff.

J'avais émis la volonté de retourner sur les traces de ses périples symboliques, mais j'écrivais déjà, en janvier 2011, "que cette entreprise n'a pas beaucoup avancé, qu'elle est même au point mort. Mais je n'y ai pas renoncé et cette nouvelle rencontre m'aiguillonne, je compte bien un jour ou l'autre aller voir la pierre à sexe de Pouligny Saint-Pierre, prochaine étape de cet intinéraire legoffien."

Nous sommes en mai 2012, et je ne suis toujours pas allé voir la pierre à sexe, cette vulve de pierre à laquelle il a rendu hommage comme expliqué dans l'extrait liminaire de ce billet.

Mais comme je dois me rendre à Chapitre Nature, le festival qui fête ses dix ans au Blanc, je songe cette fois très sérieusement à faire un détour jusqu'à ce petit bois du causse de Pouligny, qui renferme l'étrange monolithe.

arbre_suin_causse.jpg

Arbre sur le causse

PS : C'est après avoir posté ce billet que je m'aperçois que la page citée est la page 111, poursuivant donc cette symbolique du onze évoquée par ma correspondante. Cette page est celle-là même sur laquelle s'ouvre depuis des mois le recueil photocopié des pages consacrées aux lieux indriens inventoriés par JPLG. En attente d'un déplacement qui va donc venir.

10 mars 2009

La pyramide de Pouligny : divagation fromagère

Le carré inscrit dans la roue de Pouligny trouve une étonnante résonance dans l'histoire économique et culturelle de ce petit terroir, en effet, le Pouligny Saint-Pierre, comme tout bon gastronome ne l'ignore pas, est un fromage de chèvre réputé qui «  se présente, nous dit le site de la Maison du Lait, sous forme d'une pyramide élancée, à la base carrée, d'une hauteur de 12,5 cm et dont le sommet est un petit carré de 2,5 cm de côté. » L'aire d'appellation contrôlée (AOC), comprenant 22 communes est  «  aujourd'hui la plus petite zone d'appellation d'origine fromagère, mais aussi la plus ancienne au niveau caprin. » La notice de Wikipédia rapporte que c'est, dit-on, le clocher de leur église, ce même clocher à l'origine de notre quête, qui aurait inspiré aux habitants de Pouligny-Saint-Pierre la forme pyramidale.

 

Pouligny-Saint-Pierre.gif

Mais bon, comme cette même notice précise que le fromage de chèvre apparaît dans la région au XVIIIè siècle, il convient de ne prendre qu'avec circonspection ces dernières remarques...

Je ne résiste tout de même pas à vous signaler que ladite notice renvoie sur le site d'un producteur (dont j'ai vu ensuite qu'il était aussi le rédacteur de Wikipédia), installé au lieu-dit Fonterland. Or, cette propriété renferme les vestiges d'un prieuré de l'abbaye de Fontgombaud, avec une chapelle dédiée à saint Michel. Par ailleurs ce nom de Fonterlan n'est pas un inconnu pour nous, puisqu'il est lié à la légende des gouffres du Suin :

Alors la Sainte Vierge, tremblant encore à la pensée du danger qu'avait couru son fils, étendit la main vers les flots qui grondaient toujours et dit : "Méchante petite rivière, tu seras maudite dans la succession des siècles. Désormais ton cours comptera autant de gouffres qu'il y a de jours dans l'année." Et voilà pourquoi, de Salvert à Fonterlan, on peut compter 365 gouffres toujours altérés : les cataractes du ciel peuvent s'ouvrir, les bondes de la Mer Rouge peuvent être entièrement levées, les 365 gouffres du Suin, celui de Salvert en tête, boivent toutes les eaux qui descendent dans la vallée." (La Brenne, Histoire et traditions, pp. 95-96) [C'est moi qui souligne]

Bon, après cette pause fromage, retour au fondamental, avec la légende des "Bons Saints", et singulièrement l'histoire de saint Génitour.

(A suivre)

 

09 mars 2009

Le triangle de Pouligny

J'ai donc tracé les lignes reliant les trois églises de Douadic, Pouligny Saint-Pierre et Saint-Génitour du Blanc. J'ai presque cru obtenir un triangle rectangle tel que celui dessiné par les Saint-Phalier, dans le nord du département, mais il s'en fallait en réalité de 10 degrés, un écart trop grand pour être négligé. Voici la figure obtenue :

 

triangle-pouligny2.jpg

Cependant, il est possible de faire une série d' observations :

  1. Les distances Douadic – Pouligny et Pouligny – St Génitour sont pratiquement identiques ( à cinq cents mètres près).

  2. L'alignement Douadic – St Génitour atteint dans son prolongement l'église Saint-Etienne, dans la ville haute du Blanc, édifice qui a pris le relais d'une antique église également dénommée Saint-Etienne, qui se situait à l'extrémité de l'actuelle rue saint-Etienne, et dont il ne reste plus aujourd'hui aucun vestige.

  3. Cette ancienne église se situe dans le même prolongement de l'axe venu de Douadic, et sa distance à Pouligny est, à quelques dizaines de mètres près, identique à la distance Pouligny-Douadic.

alignement-eglises-leblanc.jpg

On peut également vérifier cet alignement d'églises sur le plan des paroisses avant 1789, reproduit par Lucienne Chaubin (Le Blanc, vingt siècles d'histoire, 1982), lui-même d'après le livre sur Le Blanc écrit par Chantal de la Véronne.

 

alignement-eglises-leblanc2.jpg

Ceci m'a naturellement conduit à tracer un cercle dont le centre est Pouligny Saint-Pierre, et le rayon la distance Pouligny – Douadic. Or ce cercle s'est immédiatement révélé, sur la carte Michelin 68 qui me sert depuis bien longtemps de terrain de recherche, tangent à un autre cercle mis en évidence en mai 2005, et que j'ai nommé la Roue de Nesmes*.

 

roues-pouligny-nesmes.jpg

On voit que Pouligny se situe dans l'exact prolongement de la diagonale du carré inscrit dans la grande roue**. Ces deux figures trouvées indépendamment l'une de l'autre se présentent donc dans une très grande complémentarité. Le carré inscrit dans la roue de Pouligny a un sommet commun avec celui de la roue de Nesmes.

Un autre sommet du carré inscrit se situe à Saint-Marc, lieu-dit de la commune de Douadic qui s'honore d'une chapelle. La diagonale issant de Saint-Marc va se ficher au-delà du carré à Saint-Savin, non sans prendre au passage le mystérieux monument gallo-romain dit le Saint-Fleuret, entre Sauzelles et le château de Rochefort, sur lequel j'aurai à revenir.

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*"Le village de Nesmes, situé dans le prolongement de la Luzeraize, sur les rives de l'Allemette, en aval de Château-Guillaume, ne serait-il pas le souvenir d'un ancien nemeton ?", écrivais-je en 2005. Cette hypothèse est maintenant appuyée par Stéphane Gendron, dont je ne connaissais pas alors les travaux, et qui analyse Nesmes comme issu du gaulois "*nemausos, composé de *nem- "ciel" (dans nemeton "sanctuaire") + suff. -ausos (DOTTIN 1920 : 67 ; DELAMARRE, 2003 : 197-8). Le sens a pu être "sanctuaire". De nombreux coffres funéraires ont été découverts à Nesmes et surtout près de Laluef, rive droite de l'Allemette. Enfin, un paysan découvrit, en 1864, une statuette de type Cernunnos (identification incertaine) "dans une brande près de Bélâbre". Malheureusement cette statuette est perdue (connue par une lithographie) et on ne connaît pas sa provenance exacte." (Les Noms de Lieux de l'Indre, 2004, p. 6)

**J'ai découvert aussi, postérieurement à cet article de 2005, la monographie sur Bélâbre écrite par Maxime-Jules Berry (Royer, 1992, archives d'histoire locale). Elle signale qu'"A la limite des paroisses de Ruffec et de Bélâbre, aux environs du Grand-Tremble, un lieu-dit porte encore le nom de Pilory : c'est là sans doute qu'était installé autrefois le poteau où l'on exposait les coupables condamnés par la justice des seigneurs de Bélâbre, comme s'élevait celui de la justice du Blanc, au point où le chemin de Bélâbre à cette ville rencontrant celui venant de Romefort (vers Bélivier)." Or, c'est à cet endroit que j'ai situé le centre de la Roue de Nesmes. Le pilori portait comme le souvenir du poteau central, de l'axis mundi du sanctuaire.