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22 août 2005

Saint-Denis-de-Jouhet

« En 1140, la plus royale des églises n'était pas une cathédrale, mais un monastère : saint-Denis-en-France. Depuis Dagobert, les successeurs de Clovis avaient choisi ce sanctuaire pour nécropole, et les trois races qui successivement dirigèrent le royaume n'avaient cessé d'y ensevelir leurs morts ; Charles Martel, Pépin le Bref, Charles le Chauve y reposaient dans le caveau royal près de Hugues Capet, de ses ancêtres les ducs de France, et de ses descendants, les rois. » (Georges Duby, L'Europe des Cathédrales, 1140-1280, Skira, 1984, p. 13)


C'est dans la crypte de Saint-Denis que ces rois descendaient chercher l'oriflamme déposée sur les reliquaires des saints martyrs. « Le vitrail de Saint Denis à Chartres (vers 1210/1220), les descriptions et les meilleures peintures des XIIIème et XIVème siècles montre qu'elle consistait en une bande de soie légère, rouge uni (couleur impériale ou encore celle du martyr, en l'honneur des saints Denis, Rustique et Eleuthère), assez longue, découpée de deux, trois ou cinq queues, ornée de houppes vertes et attachée par des anneaux à une lance dorée pouvant tuer l'ennemi » (Encyclopaedia Universalis, Thesaurus, p. 2177). On l'appelait aussi, du fait de sa provenance, l'enseigne Saint-Denis. On raconte qu'à Roosebeke, en 1382, les armées étant sous la bruine, le soleil ne daigna se montrer que lorsque l'oriflamme fut déployée : les Français de Charles VI purent alors assaillir les Flamands et les écraser.

L'oriflamme fut ainsi un des signes de ralliement autour de la puissance royale, à l'instar du cri de guerre des Capétiens : Montjoie Saint-Denis ! qui succéda au simple Montjoie ! des XIème et XIIème siècles. Ce terme de Montjoie, que j'ai déjà évoqué, mérite un approfondissement particulier.

Selon Anne Lombard-Jourdan, entre autres, il dérive du francique mundgawi, « protège-pays » : « Après avoir localisé au nord de Paris, dans la plaine du Lendit, le "lieu consacré, au centre de la Gaule" dont parle Jules César, elle indique comment ce sanctuaire où s'assemblaient les druides se développa autour de la "Montjoie", tombe de l'ancêtre héroïsé protecteur du pays. Dans le but de masquer et d'exorciser ce lieu de culte païen, les premiers chrétiens situèrent à cet endroit précis le martyre de saint Denis et sainte Geneviève érigea à proximité la première basilique dédiée à celui-ci. Saint-Denis devint l'équivalent et le substitut du "Protège-Pays". Son nom rejoignit celui de "Munjoie" dans l'appel des guerriers en détresse » (Note de l'éditeur). Plus largement, la montjoie désignera toute éminence, colline ou tas de pierres servant à indiquer la voie d'un pélerinage. C'est le lieu de se souvenir que sur l'axe Autun – Saint-Maixent, un des premiers indices relevés fut un Montjouan. Or, un axe quasi perpendiculaire à celui-là, passant par Montjouan, se dirige au nord vers Saint-Léger-de-Fougeret et au sud vers la grande ville de pélerinage de Paray-le-Monial en traversant Gueugnon, Chevagny et Saint-Léger-les-Paray. Tout en passant près de Mont Dardon et du hameau de Dardon, qui évoquent fortement Dordon, le lieu de naissance des fils Aymon.

 

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Eglise de Saint-Denis-de-Jouhet

Saint-Denis-de-Jouhet n'aurait-il pas la même fonction indicatrice ? N'a-t-on pas cultivé l'identification, toutes proportions gardées, avec le Saint-Denis de l'Ile-de-France ? Ainsi, de même que celui-ci est célèbre au Moyen Age pour sa foire du Lendit « où les bateliers de Seine, écrit Duby, venaient charger les fûts de vin nouveau pour les conduire vers l'Angleterre ou vers la Flandre », Saint-Denis -de-Jouhet est connu dans toute la région pour sa foire annuelle (à l'origine, dédiée aux chevaux), le 4 octobre. La date mérite examen : deux jours avant, le calendrier marque la Saint-Léger et, cinq jours après, indique la Saint-Denis.

 

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Un nouvel alignement dirigé pratiquement plein Nord, en direction donc de Paris et de Saint-Denis achèvera de fonder notre conviction : issu donc de Saint-Denis-de-Jouhet, il remonte à Saint-Denis, faubourg d'Issoudun (ancienne ville royale, qui reçut une charte de franchises de Charles VII et Louis XI lui concédant sept foires annuelles) et traverse le Bois Saint-Denis, à la sortie de Reuilly, non sans avoir frôlé au passage le hameau de Saint-Léger (unique exemple de ce toponyme dans le département de l'Indre).

Et il faut enfin savoir que l'église primitive de Reuilly, église Saint-Denis il va de soi, appartenait en propre à l'abbaye Saint-Denis-de-France.

 

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Doc : Ecole des Chartes

16:00 Publié dans Lion | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

Je suis toujours avec autant d'intérêt vos saints périples et ne peux m'empêcher de vous remercier de ces carnets de route fort riches.
En revanche, les cartes qui illustrent vos propos/déductions/liens et ricochets sont difficiles à décripter et même avec la main que je croyais loupe restent de même taille.
A bientôt

Écrit par : colette | 24 août 2005

Il s'agit à vrai dire pas d'un commentaire mais plutôt d'une question :

comment diable fait-on pour vous joindre ou vous faire part de choses et d'autres, surtout longues, autrement que ce que je suis entrain de faire où je suis arrivé quasiment par hasard après une foultitude de clics et déclics ?

Merci pour votre site, j'aurais l'occasion de m'épancher plus longuement, je l'espère.

A bientôt

Marc

Écrit par : Marc LEBEAU | 24 août 2005

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