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02 janvier 2006

Le prince de Saint-Chartier

Au fil de notre périple zodiacal, il est apparu de plus en plus clairement que l'édification de la géographie sacrée se confondait avec l'histoire de la sainteté chrétienne. Le IVème siècle de notre ère me semble constituer le point de départ de cette entreprise spirituelle. A cette époque, les évêques de Bourges sont déjà à la tête d'une immense province ecclésiastique qui incluait les évêchés de Clermont, Rodez, Albi, Cahors, Limoges, Javols (Mende), Le Puy et Toulouse. La cité elle-même était quatre fois plus vaste que Paris et le commerce y était florissant : marchands grecs, syriens et juifs y exercaient leur négoce. Il importe donc maintenant de se pencher plus avant sur les énigmes que Bourges nous présente et, en premier lieu, de revenir sur cet axe véritablement fondateur Cluis-Neuvy-Bourges, qui est apparu au terme de l'examen de la géographie sacrée biturige.

 

 

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Ruines de Cluis-Dessous (photo Etienne Bailly)

 

Partons de Cluis, dont la direction solsticiale d'été au soleil levant n'est pas indifférente. Elle vise Saint-Chartier, au nord de La Châtre, village qui doit son nom au prêtre Chartier qui servait cette paroisse sous l'épiscopat de Sulpice Sévère, à la fin du VIème siècle. Avant de prendre le nom du saint, le village se nommait Lucaniacus,  qui fait directement référence à la lumière (grec, leukos), qui atteint au solstice son apogée. « La naissance de ce nouveau jour, explique G.R. Doumayrou, est traduite seon la tradition par l'apparition d'un nouveau roi, jeune roi ou Dauphin. » (G.S. p. 72). Or les historiens avouent ne pas savoir pour quelle raison les seigneurs de Gargilesse se dessaisissent au Xème siècle du château de Cluis-Dessous (au pied duquel passe la ligne solsticiale), au profit d'Alard Guillebaud, seigneur de Châteaumeillant appelé aussi, mais nous comprenons ici pourquoi, le prince de Saint-Chartier (princeps castelli Sancti Karterii).

 

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Châteaumeillant lui-même vaut qu'on s'y arrête : on sait qu'il s'agit là du Mediolanum de la Table de Peutinger . Son église Saint-Genès est reconnue, à l'instar de la collégiale de Neuvy, comme un des plus remarquables sanctuaires romans du Berry. Or, il est possible de déceler des rapports précis entre les deux édifices ainsi qu'avec l'église Saint-Paxent de Cluis.

Il faut tout d'abord relever une identité de dédicaces : Cluis est sous le haut patronage de saint Paxent (martyr parisien du premier siècle), mais aussi de saint Etienne, premier martyr, comme la collégiale de Neuvy et la cathédrale de Bourges. Et Saint-Genès de Châteaumeillant fut dédiée elle aussi, primitivement, à saint Etienne, le vocable actuel ne datant que du XVIIème siècle.

Ensuite, il se trouve que les dimensions des trois édifices en question se recoupent bien souvent. Jugez-en : la largeur moyenne dans oeuvre de la nef de Saint-Genès est de 5 m 50, ainsi que la largeur moyenne du carré du transept ; à Neuvy, la hauteur à la clef des arcades du rond-point est aussi de 5 m 50, mesure qui est, à Cluis, la largeur du transept. La hauteur à la clef des grandes arcades de Saint-Genès est de 8 m 20, tandis que le diamètre du rond-point de Neuvy est de 8 m 30. La longueur du transept de Cluis est de 18 m, qui est exactement la mesure du diamètre de la rotonde.

On objectera à juste titre qu'il est toujours possible, avec un peu d'obstination, d'isoler des mensurations semblables entre deux monuments par ailleurs sans rapport. Cependant, dans le cas qui nous occupe, il peut être prouvé une conception unitaire, c'est-à-dire non plus seulement quelques analogies numériques mais une véritable relation d'homologie. Il suffit pour cela d'appliquer la méthode adoptée par un certain Léon Sprink dans son étude sur l'Art Sacré en Occident et en Orient.1

 

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1Léon Sprink, L'Art Sacré en Occident et en Orient, essai d'une synthèse, Ed. Xavier Mappus, Lyon, 1962. Mais j'ai recueilli ma documentation dans le tome 3 de L'émergence de l'Enel ou l'Immergence des Repères, de Vladimir Rosgnilk (Ark'All, 1988).

23:40 Publié dans Scorpion | Lien permanent | Commentaires (0)

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