Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

27 juin 2007

Vita Martini (4) : De Mars Condatis à sainte Gemme

La mort d'un saint n'est jamais anodine. Le lieu, la date, les circonstances portent un enseignement. Que le jour de cette mort soit devenu chaque fois jour de fête doit nous avertir sur le sens profond de la fête, dont nous avons à peu près perdu aujourd'hui la valeur sacrificielle qui s'y attachait. La mort de Martin ne déroge pas à l'usage. Examinons-la en détail.

Tout d'abord, elle n'a pas lieu à Tours, siège de son évêché, mais à Candes, une petite ville située, comme son nom étymologiquement l'indique (gaulois condate, confluent), à la rencontre des eaux de la Loire et de la Vienne. D'emblée, nous retrouvons la symbolique des flux mêlés qui s'est imposée dès le début de l'étude de Verseau. Les confluents sont toujours des lieux particulièrement sacrés dans toutes les mythologies, et une étude de la Société de Mythologie Française montre que "Le mot condate semble avoir gardé une charge religieuse spécifique et la proportion élevée de patronages dévolus à saint Martin pourrait être un indice de la christianisation du Mars celtique appelé parfois Condatis".

 

2ec7c34bbc2535606f4706f2cde062cd.jpg
Fronton du porche de l'église de Candes Saint-Martin


La raison officielle de la venue de Martin  à Candes est toutefois l'apaisement d' une querelle entre les clercs de l'endroit. Le devoir accompli, ses forces l'abandonnent et il est reçu le 8 novembre 397 "dans le sein d'Abraham". Le corps du saint va alors être l'objet d'une âpre lutte entre Tourangeaux et Poitevins  de Ligugé, accourus dès la rumeur de trépas prochain,  qui tous le revendiquent. Les Tourangeaux sont les plus malins car ils réussissent, selon les dires de Grégoire de Tours (Sulpice Sévère ne souffle mot du larcin), à escamoter nuitamment la sainte dépouille par une fenêtre et à la transporter jusqu'à Tours en remontant la Loire. Les obsèques  ont lieu le 11 novembre, jour  donc de la Saint-Martin.

"Selon la légende, est-il dit sur le site de saintmartindetours.eu, les Tourangeaux embarquèrent la dépouille du saint évêque dans la lumière et les chants ; tout au long de la remontée de la Loire du bateau funéraire, et plus particulièrement au lieu dit "le Port d'Ablevois" (Alba via - la voie blanche) à la Chapelle Blanche (Capella alba), aujourd'hui appelée La Chapelle-sur-Loire, les buissons des rives se couvrirent de fleurs blanches. C'est de là que vient l'expression "l'Été de la Saint Martin"."

Une semblable translation par voie fluviale a eu lieu, on le sait,  pour saint Genou, dont le corps fut  transporté de Palluau à Saint-Genou en suivant le cours de l'Indre (très court trajet d'ailleurs, dont on voit mal la nécessité matérielle, mais c'est le symbole qui importe bien sûr).


Mgr Villepelet place la fête de saint Genou au 20 juin (d'autres sources la placent au 17 janvier, comme celle de saint Sulpice). D'autres saints  sont fêtés bien sûr ce jour-là. Parmi eux, une certaine sainte Gemme, martyre en 109, jeune lusitanienne d'une grande beauté  ayant fui en Aquitaine la vindicte de son père, lequel voulait lui faire abjurer sa foi chrétienne.


Comme par hasard, le village de Sainte-Gemme (la commune s'honore aussi d'un dolmen dit de la Pierre-Saint-Martin) se place  exactement sur le méridien sud de Saint-Genou.

db0be4af79cc3df2b463d1652816b4ba.jpg

 

22:00 Publié dans Verseau | Lien permanent | Commentaires (5)

Commentaires

Bonjour Robin

L’information que vous donnez, et que je ne connaissais pas !, sur la deuxième date de la fête de Saint Genou au 20 juin m’interpelle et m’incite à revenir vers mes moutons (de Bourges !) et vers le zodiaque français que je vois s’y déployer depuis ce lieu ! (voir la présentation que vous en avez faite dans l’article consacré au Chien de Crémieu). Saint Genou présenterait ainsi la particularité d’être lié à deux dates « méridiennes » ;

Je m’explique.

Pour certains, ainsi que cela est développé sur le lien que vous mettez sur la date du 17 janvier, cette date est en effet indissolublement liée au Méridien de Paris, qu’ils nomment RoseLigne, en référence d’une part, à la couleur des lignes de cuivre mises en place pour matérialiser le Méridien dans l’église Saint Sulpice de Paris (Saint présenté ici par Robin à de multiples occasions, évêque de Bourges – proche du Méridien – dont la fête est également fixée au 17 janvier), dans la salle méridienne de l’Observatoire de Paris, mais également sur le sol de la cathédrale de Bourges, et d’autre part, à Sainte Roseline dont la fête est également fixée au 17 janvier. Pour corroborer ce lien mystérieux entre 17 janvier et Méridien de Paris, j’ai pu également constater que, si l’on me suit sur ce zodiaque français centré sur Bourges, élaboré en prenant comme zone Lion le golfe du même nom, et en respectant les étendues effectives des constellations étoilées (et non les étendues de 30° des signes du zodiaque), on s’aperçoit assez vite que la pointe Nord du Méridien de Paris, à Dunkerke est située à 62° du Point Vernal. Ces 62° traduits en jour à partir du 21 mars (rapport de 365 sur 360), nous mènent alors au 17 janvier !

Mais, le tracé méridien peut également être associé aux dates des solstices, 21 juin et 21 décembre. En effet, l’axe Sagittaire/Verseau – Gémeaux/Cancer a souvent été associé à un axe Nord/Sud : voir notamment les développements de René Guénon qui y voit une correspondance avec la Porte des Hommes (au Sud) et la Porte des Dieux (au Nord).

Il est ainsi « étonnant » de voir, dans un syncrétisme séduisant, ce Saint Genou lié à ces deux dates méridiennes fatiditiques, 17 janvier et 20 juin (si proche du solstice d’été) !

Dernière remarque, qui rejoint vos analyses ici développées, j’ai montré que la légende de Martin découpant de l’épée son manteau à Amiens (sur le Méridien de Paris) pouvait être lue comme la « trace » du Méridien sur le Territoire de ce qui allait devenir la France !

Enfin, une divagation linguistique : un des noms latins utilisés pour définir le genou, Poples (poplitis), résonne phonétiquement assez proche des noms désignant le peuple et le peuplier, Populus. Or, c’est bien connu !, le peuple plie le genou ou est à genou devant son maître, il « peut plier » (bon d’accord… !), mais Populus désigne bien les gens qui sont attachés à un territoire et qui finalement le caractérisent et le font… Quant au Peuplier, son port particulièrement rectiligne le fait reconnaître entre tous ! De là à un faire un arbre méridien ! ...

Écrit par : Marc Lebeau | 29 juin 2007

Bonjour Marc,
Merci pour ce long commentaire qui confirme, selon d'autres données, l'importance de ce saint Genou bien méconnu par ailleurs.
Continuons de divaguer joyeusement avec le peuplier : une de ses variétés, le peuplier noir sauvage, est l'espèce dominante des forêts des bords de Loire, menacée actuellement par l'aménagement du fleuve (voir site Inra : http://www.campagnesetenvironnement.fr/quel-est-ce-ravageur-du-poireau-924.html
Ceci fait écho bien entendu à la translation de Candes à Tours sur la Loire du corps de saint Martin. Peuplier noir et fleurs blanches de l'été de la Saint-Martin. Ombre et lumière. Je ne sais ce qu'en pensera le populo ?

Écrit par : Robin | 29 juin 2007

Re bonsoir Robin !

Le peuplier noir, je ne connais que ça ! , Enfin, façon de parler, mais c'est également une espèce emblématique des milieux rhénans qui tend à se raréfier drastiquement du fait de la disparition de la dynamique du fleuve, qui supprime ainsi tout rajeunissement des milieux et partant, les biotopes indispensables à son renouvellement et à son développement... Des problèmes identiques semblent donc également se faire jour en bord de Loire ?

Écrit par : Marc Lebeau | 29 juin 2007

Chez nous, la St Martin est fêtée le 10 nov et non le 11.
Cela a t il une importance symbolique ?
( les symbole du 11 et du 10 étant différents ? )
ou bien est ce "historique" ?

( je n'ai pas eu le temps d'aller voir l'eglise de St Hilaire )

Écrit par : Tara | 16 juillet 2007

La Saint-Martin est bien fixée au 11 non au 10, mais les gens font ce qu'ils veulent, n'est-ce pas ? Il faudrait savoir quand la décision de devancer la date a été prise. La Saint-Martin a été éclipsée par l'armistice : est-ce une façon de la sauver de l'oubli (ce n'est qu'une hypothèse) ?
J'espère que vous avez eu le temps, Tara, d'aller enfin à Saint-Hilaire...
Bien à vous,

Écrit par : Robin | 30 août 2007

Les commentaires sont fermés.