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Denis Gaulois (5) : De l'Aubespine
En cette saint Denis, attardons-nous un peu sur ce singulier personnage de Charles de Laubépine, ou plutôt faudrait-il écrire Charles de l'Aubespine, car c'est avec cette orthographe que, très vite, j'en ai appris beaucoup plus sur son compte. L'encyclopédie Wikipedia lui consacre tout d'abord un article où l'on découvre que notre chancelier avait un certain don pour les complots...
Garde des sceaux par la grâce de Richelieu en 1630, il sert les intérêts de celui-ci qui n'hésite pourtant pas à le jeter dans une geôle angoumoisine trois ans plus tard ( il y croupit la bagatelle de dix ans, jusqu'à la mort de Louis XIII ). Rétabli dans ses fonctions en 1650 par Anne d'Autriche, il est encore contraint à l'exil deux ans plus tard. Il meurt peu après une ultime réconciliation, à l'âge de 73 ans, ce qui n'est pas mal pour l'époque.
Blason de Charles de l'Aubespine
Un tel goût pour l'intrigue ne laisse précisément pas de nous intriguer, d'autant plus que Charles de l'Aubespine est un homme d'église (mais avec le terrible cardinal Richelieu, il était à bonne école), abbé de Préaux et par ailleurs, Chancelier et Garde des Sceaux de l'Ordre des Chevaliers du Saint-Esprit, qui fut, semble-t-il, l'ordre le plus prestigieux de la monarchie française pendant les deux siècles et demi que dura son existence. « C'est le 31 décembre 1578, en pleine guerre de religions, qu' Henri III fonda l'Ordre du Saint-Esprit, dont le but était de protéger le Roi de France, en tant que personne sacrée. Le monarque choisit le nom de Saint-Esprit pour cet Ordre, en référence à sa propre naissance, à son couronnement sur le trône de Pologne et plus tard sur celui de France, les trois évènements étant survenus le jour de la Pentecôte. »
Richelieu lui-même fut chevalier du Saint-Esprit, ainsi que le montre la statue de Francesco Schiaffino, au musée du Louvre.
Charles est chancelier de l'Ordre dès 1611. Un an après la découverte de la légende de Denis Gaulois. Un an avant, en 1609, il était ambassadeur de France en Hollande. C'est un homme qui voyage.
Présent dans toutes les affaires plus ou moins sombres du royaume, sa présence à Déols en 1610 n'est assurément pas fortuite.
09 octobre 2006 | Lien permanent
Denis Gaulois (7) : Grand Corps Malade
Il faut porter attention aux vecteurs des coïncidences, c'est-à-dire aux médias, aux supports physiques de l'information porteuse des synchronies remarquables. J'ai souvent remarqué des récurrences sur ces vecteurs, avant l'extinction finale. J'en veux encore pour illustration ce qu'on peut observer avec la dernière page du supplément Ile-de-France du Journal du Dimanche (édition du 15 octobre). Le 1er octobre, je relevai l'article en dernière page où Jérôme Charyn évoquait Hemingway.
Or, la semaine suivante, cette même dernière page était consacrée à Grand Corps Malade, alias Fabien Marsaud, un slameur qui a vendu récemment plus de 300 000 albums. Le titre de l'article est Le héraut de Saint-Denis. En effet, le jeune homme habite la ville depuis l'âge de 4 ans, et il lui voue un fier amour qu'il a exprimé dans plusieurs chansons (qu'on peut écouter ici) : « Saint-Denis, ville sans égale/ Saint-Denis, ma capitale. »
Il n'ignore pas le Récit qui fonde la ville : « La rue de la République mène à la basilique où sont enterrés tous les rois de France, tu dois le savoir/Après la géographie, petite leçon d'histoire. »
« Tous les dyonisiens, précise-t-il, connaissent la légende : le périple jusqu'à la périphérie de Paris de ce martyr nommé Denis. Décapité, il a ramassé sa tête et a dû se dire : « Je préfère mourir en banlieue. » Alors il a marché, marché, passé la porte de la Chapelle. Au bout du rouleau, il s'est écroulé ici. La Basilique fut construite là où son corps a été enfoui. La basilique, je l'ai visitée une fois en CM1. J'y suis retourné pour un festival de musique classique. On y jouait le Requiem de Mozart, impressionnant avec cette acoustique ! L'endroit idéal pour slamer. »
Bon, ce n'est pas tout à fait juste : la première sépulture de saint Denis fut à Saint-Denis de la Chapelle, comme l'a montré Anne Lombard-Jourdan. Saint-Denis fut la seconde sépulture, effectuée après translation des reliques vers 627. Ceci n'est pas très important, on pardonnera à Grand Corps Malade de vouloir faire briller sa ville. Il reste assez saisissant de voir ici s'interpénétrer mes deux catégories, ces deux fils dont j'écrivais qu'ils « ne cessent d'ailleurs de se croiser, formant un brin qu'il serait bien artificiel de démêler. »
22 octobre 2006 | Lien permanent | Commentaires (2)
Denis Gaulois (14) : Giraldus fecit istas portas
Revenons à nos bêtes féroces. La mention par Anne Lombard-Jourdan du tympan de Saint-Ursin de Bourges prend place dans la chapitre III de son livre Aux origines de Carnaval (Odile Jacob, juin 2005), chapitre intitulé Carnaval - Un moment païen au coeur du calendrier chrétien. Pour elle, ce terme de "Carnaval" "désignait primitivement le moment où les cerfs perdent leurs bois. La racine carn ne se rapporterait pas à caro, carnis, la chair, mais à cern, corn, carn (latin cornu), qui nomme la "corne" des animaux et, en particulier, "les bois du cerf". Et donc Carnaval signerait le temps où la corne va à val ou avale, autrement dit tombe : "L'adverbe "aval" et le verbe "avaler", précise-t-elle, étaient très employés au Moyen Age. Dès la Chanson de Roland, on trouve "aval" opposé à "amont". Avaler a vieilli dans le sens de "descendre" et, depuis le XVIIe siècle, on l'emploie surtout pour "faire descendre dans le gosier, déglutir". Mais Rabelais joue encore au XVIe siècle sur le double sens du mot : descendre et déglutir. Dans les Propos des bien yvres, un des buveurs s'exclame : "Si je montois aussi bien comme j'avalle, je feusse pieça hault en l'aer." Le même auteur emploie aussi la forme pronominale "s'avaler" dans le sens de " se laisser glisser en bas"." (op. cit. p. 241)
Or, cette chute des bois du cerf, placée en février sous nos latitudes, comme on peut par exemple le vérifier sur Le Grant Kalendrier et compost des Bergiers, (1491), a peut-être marqué le début de l'année dans bon nombre de sociétés païennes. Anne Lombard-Jourdan en donne quelques indices (entre autres le calendrier celtique de Coligny, la création du mois de Hornung pour février par Charlemagne, la fête du lundi du cerf (Hirschmontag) en Alsace, en Lorraine et dans le Sundgau) avant d'attirer l'attention sur le tympan de l'ancien portail de l'église de Saint-Ursin de Bourges : "Ce petit chef d'oeuvre de l'art roman offre une composition et une iconographie exceptionnelles, dont l'inspiration entièrement profane a pourtant dû être approuvée par le clergé du lieu. Chose très rare au Moyen Age, le nom du sculpteur est gravé au-dessous : GIRALDUS FECIT ISTAS PORTAS. Ce tympan comprend trois registres. Au premier sont figurés les douze mois et -voilà ce qui nous intéresse - c'est février qui commence la série. La scène représentée, un homme qui se chauffe à un feu, évoque le froid de l'hiver, qu'il commence ou s'achève. Elle a été fréquemment utilisée aux portails d'autres églises pour symboliser janvier ou février et, plus rarement, décembre. Mais au tympan de Saint-Ursin, les lettres FEB gravées au-dessous, les premières de FEBRUARIUS, écartent toute équivoque.
Au second registre se déroule, sur toute la longueur, une chasse au cerf et au sanglier remarquablement animée.*
Au troisième, sont figurées des fables : celle de la cigogne qui retire un os de la gorge du loup et celle des funérailles de Renard, lequel ressuscite et se jette sur les coqs qui le portent en terre. Ici, aucun rappel de l'Ancien ou du Nouveau Testament, aucune religieuse leçon, mais la seule évocation de ce qui faisait la vie de chaque jour et le bagage culturel de chacun. Comment expliquer une telle icinographie, par ailleurs exceptionnellement signée et donc revendiquée par l'artiste GIRALDUS ? Dans ce pays de Berry, mal irrigué par les courants novateurs et singulièrement attaché à ses traditions les plus lointaines -nous le verrons encore avec Gargantua et Mélusine -, elle traduit une inspiration profonde que les spectateurs du moment étaient parfaitement capables d'interpréter." (Op. cit. p.85. C'est moi qui souligne).
Cette spécificité du Berry, comme province "conservatoire" des traditions, revient plusieurs fois dans l'ouvrage et renforce bien évidemment notre conviction qu'ici, plus qu'ailleurs, s'est maintenue dans ses formes et ses mythes la géographie sacrée qui devait autrefois mailler tout le territoire.
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* En note, l'historienne précise que cette scène de chasse peut avoir été inspirée par celles sculptées sur les sarcophages de l' Antiquité tardive, mais qu'elle n'en est pas la copie : " Le veneur qui chevauche en tête et sonne du cor est bien médiéval : il monte avec étriers et les jambes tendues en avant, comme les chevaliers si souvent représentés sur les miniatures des XIIe et XIIIe siècles."
Sarcophage de saint Ludre (dessin de Meyer)
17 janvier 2007 | Lien permanent | Commentaires (2)
Denis Gaulois (4) : Bois sans pousser feuilles
Après avoir affronté les Anglois et la canicule, Denis Gaulois se voit infliger l'année suivante une nouvelle épreuve :
Il avoit cent onze ans. En ce temps-là, les terres de ses cantons vinrent stériles, bois sans pousser feuilles. Les habitants mouroient faute de vivres. Il leur donna grande partie de ses grains qu'il avoit cueillis, pour les faire subsister. Il étoit fort étonné ; mais il le fut davantage, lorsque les animaux de ses forêts ne trouvant plus de quoi vivre, firent un tel ravage dans ses cantons malgré le secours de ses habitants qu'il conduisoit pour les détruire, que, tout bien armés qu'ils étoient, ils manquoient à tout dévorer, hommes, femmes, bestiaux....
Une nouvelle fois les animaux sauvages sortent du bois et Denis a bien du mal ici à les contenir. Cette stérilité qui frappe ces cantons nous remet en mémoire les mythes de fécondité, la terre gaste entrevue avec l'étude de Vatan.
Ce bois sans feuilles nous évoque également l'Homme sauvage, l'Homme à l'écot des demeures philosophales (on lira avec profit le récent article d'Archer consacré à cette figure représentée sur le poteau cornier du manoir de la Salamandre à Lisieux).
Et voilà que Denis Gaulois se trouve fort dépourvu. Tel Job sur son tas de fumier, il s'interroge sur le soutien céleste :
« Denis Gaulois croyoit pour lors que Dieu ne le connaissoit plus. Il dit à ses habitants : J'ai fait mon devoir comme j'ai cru devoir le faire et je vous ai dit de faire comme moi ; les moines n'ont jamais manqué dans mes chapelles ; s'il y a quelques uns d'entre eux qui n'aient pas fait leur devoir, qu'ils me le disent ; mais comme aucun ne lui répondit, si non que de lui dire : Nous avons suivi ce que vous nous avez ordonné ; pour lors il ne savoit que penser ; il poussoit de longs soupirs vers le ciel à chaque moment et demandoit à Dieu du secours. »
Le secours vient peu après d'un « homme qu'il ne connaissoit point, qui lui dit : Père, vous êtes en peine ; les animaux vous font la guerre ; c'est que Dieu veut vous donner un successeur ; il est à Bourges ; il a beaucoup de monde avec lui ; c'est un grand chasseur ; il se nomme Léocade ; il faut le demander.- Il résolut d'y aller lui-même avec deux de ses amis. Il monta sur un de ses animaux qu'il avoit apprivoisés, et laissa les autres à la garde de ses gens. » (C'est moi qui souligne)
C'est encore à Grégoire de Tours que le conteur a emprunté : Léocade est cité dans Historia Francorum, L. I, ch.XXXI et De gloria confessorum, ch. XCII. Donné comme un des premiers sénateurs des Gaules, il aurait accordé à des chrétiens venus le voir à Lyon sa maison de Bourges afin qu'elle soit transformée en église. Converti lui-même, « il voulut être inhumé, écrit Mgr Villepelet, dans un sarcophage de pierre, tout près du tombeau en marbre de son fils saint Ludre, dans la crypte de Déols. »
Un sceau1 du Chapitre de Bourges, daté du XIIIe siècle, représente saint Léocade : « Le Chapitre de Bourges considérait en effet Léocade comme son fondateur ou du moins son grand bienfaiteur. La figure, dit M. Hubert2, ne cessera de grandir avec les siècles : le sénateur devient un personnage fabuleux qui aurait possédé toute une partie de la Gaule au sud de la Loire et les diverses puissances qui essaient au XIIe siècle de jouer un rôle politique vont se réclamer de lui à des titres divers ; les moines de saint Martial, pour prouver qu'ils en étaient eux aussi les héritiers, vont même créer la légende de sainte Valérie. »
Il est frappant de constater que cinq siècles plus tard l'on continue de se réclamer de Léocade. Mieux, la relation entre Léocade et Limoges, terre d'élection de saint Martial, se retrouve finalement dans le rapport très étroit de Condé et de la famille Laubépine, dont on a vu l'autre jour qu'elle avait charge épiscopale à Limoges, avant que de faire construire hôtel à Bourges.
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1A propos de sceau, il faut préciser que la charge de Chancelier du Roi consiste en tout premier lieu à garder les sceaux de France. Un article du Dictionnaire Raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers nous apprend que Charles de Laubépine, alors marquis de Châteauneuf, commandeur & chancelier de l'ordre du Saint - Esprit, conseiller d'état & finances,a reçu les sceaux en 1632. Qu'il n'a gardé que peu de temps car le « 25 Février 1633, le sieur de la Vrilliere, secrétaire des commandemens, eut ordre du roi d'aller retirer les sceaux des mains de M. de Châteauneuf, lequel remit aussi - tôt le coffre où étoient les sceaux » . Ce qui veut dire incidemment qu'en 1610, à la découverte de la légende, Charles de Laubépine est encore loin d'être chancelier...
2Mgr Villepelet désigne ici Eugène Hubert, auteur du Dictionnaire historique, géographique et statistique de l'Indre, Paris, 1889.
06 octobre 2006 | Lien permanent | Commentaires (1)
Denis Gaulois (2) : Du côté de la galerne
Certains ont rapproché ce passage avec la scène de chasse aux lions gravée sur le sarcophage en marbre de saint Ludre, actuellement dans la crypte de l'église Saint-Etienne à Déols.
« Il avoit déjà cent dix années, lorsqu'une troupe de gens, à lui inconnus, vint dans ses cantons pour les détruire ; mais il fut averti et rassembla ses habitants. Il rencontra ses ennemis près du canton de Déols, où il les occit tous et emporta avec lui un butin qui étoit très-considérable.
C'était une troupe d'Anglois(1), gens pervertis, sans loi ni religion. Il distribua à tous es hanitants tout ce qu'il avoit gagné sur eux, avec bien d'autres monnoies qu'il avoit fait frapper à son nom. »
En note (1), sans que l'on sache s'il s'agit d'un ajout de l'auteur originel ou d'une précision apportée par le Dr Fauconneau-Dufresne, on peut lire cette citation de Grégoire de Tours : « Britanni de Biturica a Gothis expulsi sunt, multis apud dolensum vicum perempti. (Hist. Lib. 2, cap. 18) Ce que François-Dominique Fournier traduit par « Les Bretons furent chassés de Bourges par les Goths, qui en tuèrent un grand nombre prés du bourg de Dol. »
Par Dol il faut entendre Déols : c'est d'ailleurs ce qu'on peut lire sur une traduction « angloise » de l'extrait : « The Britons were expelled from Bourges by the Goths after the killing of many of them at Bourg-de-Deols »
Comme on le voit, le clerc qui a imaginé toute cette histoire avait des lettres : Grégoire de Tours lui était rien moins que familier. A la fantaisie se mêle donc une érudition certaine, qui doit nous inciter à redoubler de vigilance, et à essayer de lire « à plus hault sens », comme le demandait Rabelais pour ses propres oeuvres.
Curieusement, la traduction britannique se trouve dans un ouvrage d'un certain Geoffrey Ashe intitulé "A Certain Very Ancient Book": Traces of an Arthurian Source in Geoffrey of Monmouth's History , Speculum, Vol. 56, No. 2 (Apr., 1981), pp. 301-323 ( malheureusement, il faut un mot de passe pour consulter plus avant ce document appartenant à la Medieval Academy of America). On la retrouve par ailleurs dans une thèse d'Adam Levin, elle, tout à fait accessible, datée de 1994, et nommée King Arthur's Death in Legend, History and Literature.
Je mentionne ces détails parce que ces références au roi Arthur deviennent intéressantes à partir du moment où l'on sait que saint Gildas, personnage par ailleurs historiquement avéré, intervient, dans sa légende, auprès du roi Arthur lorsque la reine Guenièvre se fait enlever par Meleagan : « Il aurait convaincu les deux rois de faire la paix bien que le frère de Gildas ait été tué par Arthur. Il est difficile de savoir si cette anecdote est vraie, étant donné qu'elle date d'un manuscrit du XIIe siècle , mais il est effectivement possible que le roi Arthur ait causé la mort du frère de Saint Gildas, ce qui pourrait expliquer pourquoi il ne figure pas dans la chronique de ce dernier (le De Excidio Britanniae, où Gildas s'adresse à cinq grands rois). »
Qu'il faille chercher dans cette direction bretonne, j'en vois encore un indice dans le passage suivant où, après l'affrontement avec les envahisseurs anglois, survient la canicule :
« Quelque jours après, les chaleurs devinrent si grandes que les animaux des bois venoient par bandes dans ses cantons, où ils causoient un grand dommage. Il fut obligé, par l'avis de ses amis, de faire faire un souterrain près son luant et la chapelle de Saint-Denis, du côté de la galerne, pour s'y loger l'été avec ses animaux et ses domestiques. »(C'est moi qui souligne)
J'ignorais complètement ce que c'était que la galerne. Le net m'apprit rapidement qu'il s'agissait d'un vent de nord-ouest, et je complétai mon instruction avec l'excellent dictionnaire des vents de Jean-Loïc Le Quellec, Par Vents et par Mots, acheté en août sur la foire aux livres d'Angles-sur-l'Anglin. Ce mot apparu vers 1150 est d'origine indéterminée : « On pourrait penser à une racine celtique connotant la fureur et la puissance (voir le gallois gal « fureur », le vieil-iralndais gal de même sens, et d'où peut-être le verbe normand galir, « jeter » qu'on a rapproché de jaillir). La finale en -erne serait à rapprocher de siberne, l'un des noms donnés à la bise. Etymologiquement, le vent de galerne serait alors celui qui « jaillit avec fureur ». Le mot est noté gualerne par Rabelais (Quart Livre, chapitre XLIII) et se trouve à l'origine du breton gwalarn. » Un galerneau, poursuit l'auteur, est une « giboulée froide de mars, venant par vent de nord-ouest », dans le Berry et la Sologne.
Denis cherche donc la fraîcheur en plaçant l'ouverture de son souterrain vers la galerne, donc le nord-ouest, autant dire vers la Bretagne. D'où vinrent jadis les moines de Saint-Gildas, fuyant la presqu'île de Rhuys devant les invasions normandes.
30 septembre 2006 | Lien permanent | Commentaires (2)
Denis Gaulois (8) : Du prince de Condé
CONDÉ, prudent,
commence une phrase incertaine
Le profond respect que j'ai pour Votre Majesté...
HENRI l'interrompt, souriant
Pas de formules. Tu vas voir que nous sommes au-delà des formules. J'aime comme un vieux sot, à fond et sans espoir. C'est une enfant, Condé ! Et moi qui n'ai jamais rien respecté, moi à qui la vue d'un jupon sur une taille souple effaçait de l'esprit jusqu'à la notion du respect, je découvre cette curieuse chose au fond de moi. Et je trouve çela très doux.
Il s'arrête, il tisonne le feu. Condé sent qu'il faut dire quelque chose.
CONDÉ
Je suis profondément touché de la confiance que Votre Majesté me témoigne.(...)
Jean Anouilh (Vive Henri IV ! ou La Galigaï, La Table Ronde, 2000)
Anouilh met ici en scène, dans cette pièce peu connue, le prince de Condé, futur prince de Déols et de Châteauroux, et le « bon roi » Henri IV qui lui demande d'épouser la très jeune Charlotte de Montmorency dont il est tombé fou amoureux. Il va sans dire que le Vert-Galant espère que le futur mari, auquel on prête peu de goût pour les femmes, lui laissera les coudées franches. Espoir qui sera cruellement déçu, car Condé s'enfuira avec sa belle à l'étranger. Et cela sans tarder, car le mariage aura lieu à Chantilly, propriété de Condé, le 17 mai 1609, et la fuite vers les Pays-Bas espagnols est datée du 29 novembre de la même année. Au printemps 1610, Condé laisse sa femme à Bruxelles et rejoint l'armée espagnole de Lombardie. L'assassinat d'Henri lui permet alors de revenir en France et de devenir tuteur du jeune roi encore mineur, avec les deux autres princes du sang, Conti et Soissons.
Condé, décrit par Michel Carmona comme un « homme plus colérique qu'intelligent », ne tarde pas à s'emporter contre Marie de Médicis, la Régente du royaume, qui lui refuse son soutien dans la polémique qu'il mène en 1614 avec l'évêque de Poitiers, Monseigneur de La Roche-Posay, qui lui a fermé les portes de la ville. Le 14 juillet de la même année, il se rend à Châteauroux pour y rencontrer le vieux Sully qu'il espère gagner à sa cause. C'est la première fois que l'histoire personnelle du prince croise la capitale berrichonne. Ses liens avec le Berry ne vont dès lors cesser de se renforcer : peu après la cérémonie de proclamation officielle de la majorité du Roi, le 2 octobre (Louis XIII atteint l'âge de 13 ans), on convoque les Etats-Généraux, et Condé fait élire comme député de la Noblesse dans le bailliage de Berry Henri de La Châtre, comte de Nançay. Ce qui ne sied absolument pas à la Reine-Mère qui le remplace promptement par un de ses fidèles, Guillaume Pot, seigneur de Rhodes et Grand-Maître des Cérémonies.
Gisant de Condé (Gilles Guérin, Musée du Louvre)
En 1616, l'affrontement entre Condé et Marie de Médicis prend une tournure dramatique et militaire. Le prince lève une armée contre la Régente, mais, renonçant à attaquer la capitale bien défendue par de nombreuses troupes, il entreprend de la contourner par l'ouest pour rejoindre les escouades du duc de Rohan. Il ne passe la Loire qu'à grand-peine et va s'installer en Berry : « Il choisit de s'établir lui-même à Châteauroux, précise Carmona, tandis que ses forces se dispersent aux alentours. »
La diplomatie va reprendre ses droits et c'est Richelieu lui-même, expressément mandaté par la Reine-Mère, qui va descendre à Bourges s'entretenir avec Condé. L'habile homme parvient à le convaincre de revenir à Paris : le 17 juillet, il quitte brusquement le Berry et fait son apparition le 28 juillet à Bourg-la-Reine, « où son arrivée surprend ses amis ».
« Le 29 juillet 1616, continue Carmona, Condé se rend directement au Louvre et va s'incliner devant la Reine-Mère. Tout le monde note qu'elle lui fait bon visage et que la conversation se déroule sur un ton d'évidente cordialité. Lorsque survient le Roi, celui-ci fait fête au prince et l'embrasse à deux reprises.(...) Une véritable cour commence dès le lendemain à défiler auprès de Condé. Les hommages qui fusent, l'empressement que chacun montre auprès de lui, lui montent à la tête. Même les ambassadeurs se rendent en sa résidence comme s'il était le véritable détenteur du pouvoir. »
Françoise Hildesheimer résume en une phrase la situation de Condé : « Condé, gagné par la diplomatie de Richelieu, approuve ses choix et, se croyant tout-puissant, s'essaie avec arrogance à la direction du Conseil et à l'opposition à Concini, qui se ressaisit du pouvoir en le faisant arrêter le 1er septembre 1616, en dépit de toutes les promesses qui lui ont été prodiguées. » (Op.cit. p. 65)
Il ne sera libéré que le 20 octobre 1619 et ne jouera plus dès lors qu'un rôle mineur dans l'histoire du pays.
Condé, Henri II de Bourbon, faut-il le rappeler, a donc failli s'asseoir sur le trône. Grand Veneur, premier prince du sang, il figurait sur la liste des possibles héritiers de la Couronne, si les fils du Roi venaient à mourir. Son ancrage en Berry, sa volonté de rattachement à Déols forcent la curiosité. Ne s'agissait-il pas de montrer les liens symboliques extrêmement forts qui l'unissaient à un des centres de la géographie sacrée de la terre française ? Notons qu'à cette époque encore, le Roi Très Chrétien était toujours considérée comme personne sacrée et thaumaturge : F. Hildesheimer précise que « Louis XII touche très régulièrement les écrouelles ; ainsi, en 1633, à trois reprises, à Pâques, en la fête du Saint-Sacrement, puis à la Toussaint. » « Vicaire du Christ au royaume de France », il est « l'objet de la part de ses sujets d'une vénération qui va bien au-delà de la simple obéissance civile. De nombreux symboles de la royauté divine lui sont d'ailleurs réservés : rayon de la divinité descendue sur terre, il partage l'usage du dais avec le seul Saint-Sacrement. » (op. cit. p. 80)
La légende de Denis Gaulois a-t-elle été inventée pour la gloire de Condé ? On ne saurait l'affirmer avec certitude, mais tout se passe comme s'il s'était agi de magnifier un lieu sacré, en empruntant à la fois aux sources littéraires connues (Grégoire de Tours) et au légendaire dyonisien développé par la célèbre abbaye royale. La réunion même des deux noms, Denis et Gaulois, se retrouve dans l'historiographie de l'abbaye où saint Denis était présenté comme « l'Apôtre des Gaulois », apostolus Gallorum. Anne Lombard-Jourdan écrit encore que le « 3 juillet 987, Adalbéron sacra Hugues à Reims en qualité de « roi des Gaulois » (rex Gallorum). Est-ce sous ce titre qu'il se fit couronner une seconde fois à Saint-Denis, moins d'un mois après ? » (Montjoie et Saint-Denis !, p. 248)
27 octobre 2006 | Lien permanent | Commentaires (5)
Denis Gaulois (13) : 7 J 17
Aux Archives Départementales, j'ai trouvé copie de la légende de Denis Gaulois. Le manuscrit faisait partie du lot 7 J 17 : il ne paie pas de mine. Rédigé - à ce qu'on peut lire en préambule- par le prieur Jean Devineau, à la demande de son altesse sérénissime le Prince de Condé, il ne se présente pas en effet comme un acte prestigieux, objet de soins particuliers : l'écriture s'y dégrade considérablement au fil des pages, les ratures et les corrections y sont nombreuses, mais peut-être s'agit-il d'une simple copie d'un document plus officiel ? C'est d'ailleurs en tant que copie qu'il est répertorié aux Archives. Impossible d'en savoir plus pour l'instant : je l'ai déjà dit, cette légende n'a guère mobilisé l'attention des historiens et érudits locaux, qui ont sans doute été désarçonnés par la fantaisie d'un texte dont le statut reste improbable, n'étant manifestement ni légende populaire, ni chronique historique un tantinet crédible.
C'était donc un beau moment d'émotion que de relire sous l'encre priorale les épisodes de la vie de Denis, mais je dois confesser que ça ne m'a guère fait progresser dans la réflexion. Nous allons donc reprendre l'histoire là où je l'ai laissée fin novembre, avec l'arrivée de Denis à Bourges et sa rencontre avec le patriarche Ursin. Léocade fait alors son entrée :
"Le patriarche fit venir Léocade, qui promit de suivre le père Gaulois ; mais, après sa mort, il vouloit avoir ses biens ; il lui dit : Je le veux, mais il faut vous faire baptizer. - Il fit refus, disant : Je n'ai quitté mon pays pour cela. -Cependant le patriarche et le bon vieillard le firent consentir, et en passèrent acte que Léocade apporta lui-même aux habitants de ces cantons, pour leur faire voir qu'il avoit reçu le sacrement de baptême avec son fils Ludre et sa famille, tous des mains du patriarche Ursin, en l'église de saint Etienne. Avant que de partir, Léocade fut nommé gouverneur de la Gaule, en présence du seigneur Gaulois, qui y consentit. Ils firent leurs adieux au patriarche, qui, en les quittant, leur dit : Dieu soit avec vous ; ne vous quittez pas ; ne vous lassez point de bâtir des temples ; secourez les affligés. - Ils partirent ensuite et prirent leur route vers le canton de Déols."
Nous assistons ici à un sacré marché qui n'a rien de mystique: Léocade met ses compétences de chasseur au service du vieux Gaulois mais exige ses biens en retour après trépas (qui ne saurait bien tarder logiquement vu l'âge canonique du héros). Revendication somme toute colossale. Réponse de Denis : d'accord mais après baptême. Refus tout d'abord du Nemrod avec cette réplique qui ne manque pas de sel : Je n'ai quitté mon pays pour cela.
Notons bien qu'il ne dit pas : Je ne quitterai pas mon pays pour cela. Non, il emploie le passé, or à aucun endroit de la légende, il n'a été dit que Léocade a quitté son pays, il a toujours été donné comme vivant à Bourges. L'auteur du texte commet une légère incohérence qui révèle en creux la source scripturaire qui n'est autre que Grégoire de Tours, où Léocade quitte en effet sa ville de Lyon pour celle de Bourges. Finalement, il accepte le baptême, après forcing des deux ancêtres. Mais, pour être plus sûr, il est nommé gouverneur de la Gaule "avant que de partir"... Fin de la transaction.
Il est intéressant maintenant de scruter les détails où l'auteur innove par rapport à la source : ainsi Léocade est donné, on l'a dit, comme un chasseur, quand Grégoire de Tours ne le désigne que comme un haut dignitaire romain. Pourquoi un chasseur ?
Sur le site Apemutam (Archéologie musicale médiévale), dans un article sur le cor de chasse roman, il est écrit que "Dans la sculpture romane, la chasse constitue une prédicationpour montrer la poursuite du bien et du mal, les Etapes de la vie du Chrétien, les Ages de la vie." Et devinez quel est l'exemple qui en est aussitôt donné : "Le tympan de Saint-Ursin de Bourges représente le temps de la vie du Chrétien avec les travaux des mois, la chasse aux tempéraments représentés par divers animaux (âne, sanglier, cerf), les Ages de la vie avec les arbres figurés en différentes saisons, comme sur les sarcophages romains de Déols, de Reims et sur la frise romaine remployée sur le mur extérieur de la cathédrale du Puy. La chasse à l'épieu aurait suffi pour exprimer l'activité cynégétique, mais on remarque que le sculpteur a placé un cor dans la bouche du cavalier." (C'est moi qui souligne.)
" Grégoire de Tours raconte la terrible colère du roi Gontran à la suite du vol du cor qui lui servait à rassembler ses chiens et à mettre en fuite les troupeaux de cerfs "aux cornes arborescentes". Il jeta dans les fers beaucoup de gens à cause de cette perte." Anne Lombard-Jourdan qui rapporte cette anecdote (Aux origines de Carnaval, p.94) non seulement s'est longuement penchée sur la valeur rituelle de la chasse, mais a consacré quelques paragraphes de première importance au tympan de Saint-Ursin de Bourges. Examen d'iceux au prochain épisode.
03 janvier 2007 | Lien permanent | Commentaires (1)
Denis Gaulois (17) : Déols, Cahors et le chaos
"Avant que de retourner à Bourges, le patriarche Ursin recommanda au père gaulois de penser souvent à la loi de Dieu ; il lui répondit qu'il ne l'oublieroit jamais.
Le même jour, au soir, Denis gaulois fut à l'oraison ; étant à genoux, les bras croisés, il mourut après l'oraison. Le religieux voulut lui parler, mais il fut surpris de voir son seigneur mort. Il en avertit Léocade qui vint avec sa famille et ses gens ; il le fit enterrer dans le même endroit. Il fut fort regretté de tous les habitants de ses cantons.
Léocade, Ludre et ses gens eurent bien de la peine à contenir les animaux du défunt : ils pleuroient leur maître et vouloient entrer dans la chapelle.
Léocade fut héritier de tous les biens de Denis Gaulois ; mais il ne garda pas longtemps les animaux, qui moururent bientôt après leur maître."
De ce tropisme, on peut voir une dernière illustration avec le tympan du Christ de Déols, dont quelques fragments sont conservés au Musée de Châteauroux. Selon Jean Favière (Berry Roman, Zodiaque, 1970, p. 201), il évoque "plus spécialement le Christ du tympan de Cahors." Or Cahors est situé au Nord géographique de Toulouse, l'autre grand centre zodiacal héritier des omphaloi égéens. Le tympan lui-même de cette cathédrale Saint-Etienne est celui du portail Nord.
Le socle sur lequel repose le Christ de Déols est porté par deux animaux : le lion et le dragon. "Cette représentation des symboles de l'Antéchrist et du Diable suivant Honorius d'Autun, poursuit Jean Favière, fréquente dans la sculpture gothique, est unique dans l'iconographie des portails romans."
Est-ce là encore un écho à Cahors, que Doumayrou rattache au chaos primordial ? "Ce nom, ainsi que celui du Quercy, vient des celtes Cadurques, avec le souvenir des racines grecques cha, s'entrouvrir (d'où vient chaos) et chad, prendre, saisir, caractérisant l'avidité bien connue de cette gueule d'enfer qu'est le chaos." (Géographie sidérale, p.168)Cette représentation répond en tout cas, sur le territoire berrichon, à la présence en bas de l'axe Cancer-Capricorne, des villages de Mortroux, Moutier-Malcard, Malval, Châtelus-Malvaleix, qui tous portent la marque d'un symbolisme "maléficié". Malval, la "vallée mauvaise", est ainsi l'exact opposé de la montagne céleste que figure le pôle déolois.
18 avril 2007 | Lien permanent | Commentaires (2)
Denis Gaulois (3) : Et moi je fais ce que je veux d'elles
« Il étoit beau de voir la conduite des susdits animaux ; comme ils entroient et sortoient dudit caveau pour aller pâturer et faire ce qu'ils avoient besoin, et comment le bonhomme les rappeloit. L'on a vu, disoit-il, les bêtes se dévorer entre elles et manger les hommes, et moi je fais ce que je veux d'elles. »
Il y aura donc bientôt quatre cents ans, le 2 octobre 1610, l'on découvrait donc la légende de Denis Gaulois sous un autel de l'église de Déols. Le docteur Fauconneau-Dufresne ne précise pas quelle église, ni ne donne de précisions sur la nature du document, son aspect, son état de conservation. Etrange découverte : par le plus singulier des hasards, le chancelier du roi, Charles de Laubépine, est présent (il est spécifié qu'il fait inventorier la légende séance tenante). Au fait, qui est le roi à cette date ? Henri IV a été assassiné par Ravaillac quelques mois plus tôt, le 14 mai précisément. La veille, Marie de Médicis avait été enfin sacrée reine de France à Saint-Denis par le cardinal François de Joyeuse. Un couronnement que le bon roi Henri avait longtemps repoussé. Louis XIII n'ayant que neuf ans, c'est donc Marie de Médicis qui assure la régence. Y a-t-il un lien entre ces événements et la découverte de la légende ? Quelques indices tendent à le croire.
Onze ans plus tard, nous avons vu que le prieur claustral délivrait une copie notariée et dûment certifiée au prince de Condé, devenu duc de Châteauroux et prince de Déols. Or, Condé n'est pas n'importe qui dans le royaume.
Henri II de Bourbon-Condé n' était rien moins que Premier Prince du sang, Grand Veneur et Grand Louvetier du royaume. Elevé par Henri IV lui-même - son père ayant été assassiné et sa mère emprisonnée - mariée ensuite à la trop belle Charlotte de Montmorency que son mentor poursuivait de ses assiduités, il avait dû s'exiler à Bruxelles. La mort de Henri lui permet de revenir en France. Embastillé en 1615, il est libéré quelques années plus tard par Louis XIII. Et en 1621, on lui remet donc les clés de Châteauroux et de Déols, en même temps que la copie certifiée de la légende. Pourquoi une telle mise en scène ? Ce qui nous apparaît comme une aimable fantaisie a très certainement son importance symbolique : n'y a-t-il pas comme un air de famille entre ce Denis Gaulois, éleveur de bêtes féroces, grand chasseur, dompteur émérite, et ce Grand Veneur et Grand Louvetier de prince de Condé ?
« A cette époque, peut-on lire sur le site des Amis de Jacques Coeur, le frère de Claude de Laubépine, évêque de Limoges fait construire un hôtel qui prend comme nom Hôtel de Limoges, aujourd'hui disparu. De 1629 à 1636, le prince de Condé et son frère le prince de Conti habiteront respectivement le palais de Jacques Cœur et l'hôtel de Limoges. »
Comme par hasard, Condé vient loger chez Laubépine.
Or, nous allons bientôt voir l'importance de Bourges dans la légende déoloise.
Pour en finir aujourd'hui, regardons la date : 2 octobre. C'est la saint Léger. Dont j'ai déjà montré ailleurs la corrélation très forte avec saint Denis. Un seul exemple : lors de la translation du corps de saint Léger, le cortège s'arrête à Ingrandes dans la Vienne :
« Ingrandes apparaît comme le lieu de plusieurs miracles dans le récit de la translation des cendres de saint Léger, depuis l'endroit de son supplice jusqu'à Saint-Maixent (Deux-Sèvres), en 683. Le cortège qui accompagnait les cendres du saint comprenait de nombreux mendiants et infirmes ; il s'arrêta quelque temps à Ingrandes. L'évêque de Poitiers leur avait fait porter des vivres, mais en quantité insuffisante. Une nouvelle multiplication des pains vint à bout de la disette. Des guérisons miraculeuses furent également rapportées : celles d'un boiteux, d'un paralytique, d'un jeune aveugle, d'une femme aux mains tordues... »
Or, le même site du diocèse de Poitiers précise que « Sous l'Ancien Régime, la cure d'Ingrandes était à la nomination du prieur de Saint-Denis-en-Vaux, qui dépendait de la grande abbaye de Saint-Denis-en-France. »
02 octobre 2006 | Lien permanent | Commentaires (3)
Denis Gaulois (18) : D'argent et de gueules
"Telle est la légende de Denis Gaulois, conclut le docteur Fauconneau-Dufresne, qui se trouve en tête de la pièce intitulée : .Petite chronique et généalogie des seigneurs qui ont possédé les terres de Déols et Châteauroux, depuis l'an 218 jusqu'en 900, et depuis l'an 900 jusqu'à l'an 1620, et les dons qu'ils ont fait"
Avant de conclure à mon tour cette petite étude de la légende, je voudrais revenir sur un point d'héraldique abordé récemment.
J'ai dit qu'Argenton possédait au centre de ses armes celles de Déols. Pour être plus précis, il s'agit d'un demi écusson fascé d'argent et de gueules.
Ces deux couleurs apparaissent également dans le blason des Chauvigny, qui succèdent aux princes de Déols à partir de 1187. D'ailleurs ce sont leurs armes qui figurent aussi en haut à gauche du blason d'Argenton (d'argent à cinq fusées et deux demies de gueules accolées et rangées en fasce, accompagnées en chef d'un lambel de six pendants du même).
Par sérendipité, j'ai découvert ensuite qu'argent et gueules étaient également les couleurs de Dol-de-Bretagne, dont j'ai déjà mis en relief la parenté étymologique, géophysique et mythologique avec Déols.
Pour être tout à fait précis, le blason actuel de la ville est très différent, mais le site Geobreizh confirme bien que "Le premier blason de l'archevêché de Dol datant de 1173 était de gueule fuselé d'hermine (rouge avec des losanges d'hermine). Le second était écartelé d'argent et de gueules."
Pourquoi maintenant ces deux couleurs : d'argent et de gueules ? Selon le tableau de correspondances des couleurs héraldiques établi par Gérard de Sorval (Le langage secret du blason, Bibliothèque de l'Hermétisme, Albin Michel, 1981, p.108-109), Argent peut être rattaché à la Lune et à Artémis, tandis que Gueules est logiquement dévolu à Mars. Or, nous avons encore en mémoire les épisodes mythologiques du sarcophage de saint Ludre, où Artémis se taillait la part belle. Marc Lebeau avait justement fait observer que la relation Bélier-Capricorne visible sur le terrain avec Argenton-Leucade se reflétait dans la légende où Méléagre, le tueur du sanglier de Calydon, était selon certaines sources considéré comme le fils d'Arès.
Ici se clôt notre périple capricornien. Je laisse à chacun le temps de la réflexion, le temps d'une pause océane ainsi que nous en avons pris l'heureuse habitude. Les commentaires seront aussi momentanément fermés. Au retour, nous arpenterons enfin les terres encore indéfrichés de Verseau (le seul signe qui n'a pas encore sa catégorie). Merci à vous tous, lecteurs de plus en plus nombreux, qui me donnez désir et courage de continuer ce voyage en symbolisme.
22 avril 2007 | Lien permanent | Commentaires (2)